Les Fast Radio Bursts (FRB) sont des bouffées d'ondes radio très courtes. 22 ont été détectées à ce jour, et leur origine demeure toujours mystérieuse. Un suivi de la FRB 150215 juste après sa détection a été effectué dans toutes les longueurs d'onde imaginables, des rayons gamma aux neutrinos. Résultat : rien de détectable... Mais une particularité de notre galaxie est apparue...
La première FRB a été détectée il y a 10 ans tout juste. Aujourd'hui, avec FRB 150215, nous en sommes à 22. Celle-ci a été détectée par le radiotélescope australien Parkes le 15 février 2015 et a duré 2,8 ms. Contrairement aux FRB antérieures, les astrophysiciens ont réussi à mettre en place très vite après la détection une flopée de moyens observationnels dans toutes les longueurs d'ondes pour scruter la zone d'origine de FRB 150215 à la recherche d'une contrepartie ou d'un signal rémanent. Pas moins de 11 télescopes ou détecteurs ont été exploités ! Emily Petroff (Netherlands Institute for Radio Astronomy) et son équipe ont ainsi regardé avec H.E.S.S (rayons gamma de très haute énergie), le Thai National Telescope (visible), ANTARES (neutrinos), le Australia Telescope Compact Array (ondes radio), Swift (rayons gamma), Chandra (rayons gamma), Magellan (visible), la Dark Energy Camera du Blanco Telescope (infra-rouge), le GMRT indien (ondes radio), le radiotélescope Lovell (ondes radio) et le réseau VLA (ondes radio).
Les chercheurs n'ont absolument rien trouvé dans la zone où FRB 150215 a été détectée... aucune rémanence ou contrepartie. Et au cours des 17,25 heures qui ont suivi la détection, aucune autre bouffée n'a été détectée...
Mais les astrophysiciens ont tout de même trouvé une information intéressante, liée à notre galaxie. Car FRB 150215 était située presque dans le plan galactique, exactement à 5,28° au dessus du plan. Dans cette région de notre galaxie, le champ magnétique galactique aurait dû interagir avec le signal des ondes radio de la FRB en induisant une rotation de leur polarisation. Mais bizarrement, les ondes radios de FRB150215 ne montraient pas du tout de rotation, mais au contraire une polarisation linéaire de 43%.
Il semble donc que la bouffée de FRB150215 soit passée par un "trou" magnétique de notre galaxie, étonnant, qui n'a pour le moment que des explications peu étayées. Emily Petroff et ses collaborateurs estiment même que ce "trou" magnétique pourrait avoir facilité d'une manière ou d'une autre, la détection de la FRB, car parmi les 22 détectées à ce jour, la grande majorité se trouvaient bizarrement en dehors du plan galactique.
Le mystère des FRB, à défaut de s'épaissir, semble donc se poursuivre, et c'est passionnant.
Référence
A polarized fast radio burst at low Galactic latitude
E. Petroff et al.
accepté pour publication dans Monthly Notices of the Royal Astronomical Society
Illustration
1) Image infra-rouge de la zone de FRB150215 obtenue avec l'instrument DECam. Les cercles bleus sont centrés sur le point d'origine de la détection de FRB150215 par la radiotelesope Parkes. (E Petroff et al.)
2) Signal radio mesuré par le radiotelescope Parkes le 15 février 2015 (E. Petroff et al.)
7 commentaires :
Il ne parlent pas d'une origine terrestre, comme un flash de satellite.
La polarisation fait d'ailleurs penser à une réflexion sur une antenne
Non, on sait que les FRB ont une origine extra galactique, ils proviennent d'autres galaxies que la nôtre...
Bonjour,
Pour être si sûr que l'origine est si lointaine, est-ce que c'est en ayant mesuré ou déterminé approximativement leur distance ? D'ailleurs, comment peut-on mesurer l'origine d'une source radio quand le signal a été si court ?
On sait qu'elles sont d'origine extragalactique car il y a le cas FRB 121102 qui a la particularité d'avoir été répétitif et dont l'origine a pu être trouvée, une petite galaxie située à un peu plus de 3 milliards d'années. (distance mesurée par le décalage spectral vers le rouge).
Dans le cas de FRB 121102 je comprends bien, c'est incontestable. Ce qui m'intrigue c'est pour les autres FRB qui n'ont eu aucune répétition et d'une durée trop courte pour les méthodes par décalage spectral ou parallaxe... Comment sont-ils sûr que l'origine n'est pas terrestre ? Se contentent-ils d'un rapport détaillé de l'environnement de l'instrument ?
Bon il y a d'autres indices que FRB121102, comme par exemple la mesure de la dispersion spectrale du signal (la mesure de la fréquence (ou longueur d'onde, ça revient au même) en fonction du temps d'arrivée à l'intérieur des quelques millisecondes du burst. Ça se mesure même avec des durées aussi courtes. Les plus longues longueurs d'ondes arrivent lègèrement plus tard que les plus courtes. Cette dispersion est assez importante, plus grande que celle qui serait attendue si la source émettrice se trouvait dans notre galaxie. Elle est d'ailleurs cohérente avec une propagation des ondes dans un plasma ionisé.
Il y a aussi le fait que les FRB qui ont été détectées sont distribuées de manière isotropique dans le ciel, et pas seulement dans le plan galactique (où il y en a d'ailleurs un peu oins que l'attendu), ce qui milite aussi pour une origine extra-galactique.
Enfin, une mesure avec l'interferomètre australien UTMOST (voir là : http://astronomy.swin.edu.au/research/utmost/), en évaluant la courbure du front d'onde, a prouvé que les ondes radio de plusieurs FRB étaient distantes d'au minimum 10 000 km, excluant une origine terrestre ou orbitale.
En espérant avoir répondu à votre question.
Merci.
Si j'ai bien compris les explications du site de UTMOST, la mesure de la dispersion spectrale permet d'estimer grossièrement le "décalage vers le rouge", et indirectement de pouvoir exclure une origine très proche de la Terre.
La dernière partie de la page ci-dessous évoque une autre méthode que permettra (ou permet déjà ?) MOST ; celui-ci est une antenne très allongée, d'Est en Ouest, de forme cylindrique tronquée, et dans le cadre du projet UTMOST l'antenne est décomposée en secteurs isolés (avec chacun un capteur) de sorte que chaque capteur observe un champ d'ondes conique plat. Ils activent et analysent un secteur à la fois, l'un après l'autre, de sorte qu'ils peuvent voir une émission se déplacer entre les secteurs (c'est la Terre qui tourne, pas la source qui bouge). Après leur test réussi avec quelques secteurs envers un pulsar, ils le font (ou déjà fait ?) évoluer en 1000 secteurs ce qui réduirait assez la largeur du champ pour observer les variations d'une FRB.
http://astronomy.swin.edu.au/research/utmost/?page_id=103
Enregistrer un commentaire