On a l'habitude d'être conquis par les records de vitesse, d'énergie ou les records de distance. Cette fois-ci, c'est un record de lenteur dont je vais vous parler : la découverte du pulsar le plus lent jamais découvert. Il fait un tour sur lui-même en 23,5 secondes, ce qui est très très lent pour un pulsar... Une telle lenteur pose un petit challenge aux spécialistes.
C'est avec le radiotélescope néérlandais LOFAR (LOw Frequency ARray) que le chercheur doctorant Chiamin Tan (Université de Manchester) et ses collaborateurs européens, sud-africains et australiens ont trouvé en juin 2017 ce pulsar PSR J0250+5854 qui montrait une période de rotation très anormalement longue. On le rappelle, les pulsars sont des étoiles à neutrons qui tournent très vite sur elles-mêmes, avec une période de quelques secondes jusqu'à quelques millisecondes. On les détecte grâce aux ondes radio qui émanent de leur surface magnétisée et qui forment un fin pinceau balayant l'espace en suivant la rotation de l'étoile à neutrons. Le pulsar le plus rapide que nous connaissons a une période de rotation de 1,4 millisecondes (soit 714 tours par seconde) et celui qui détenait le record de lenteur jusqu'à aujourd'hui a une période de 8,5 secondes (ce qui fait 7 tours par minute). Mais ce nouveau recordman de lenteur, qui se situe dans la constellation de Cassiopée à une distance de 5200 a.l. explose littéralement le record avec sa période de 23,5 s (seulement 2,55 tours par minute). PSR J0250+5854 tourne donc 15000 fois moins vite que le pulsar le plus rapide...
Tan et son équipe ont découvert cet escargot dans le relevé LOTAAS (LOFAR Tied-Array All-Sky Survey), qui scanne tout le ciel boréal avec le réseau de radiotélescopes LOFAR, centré sur la fréquence de 135 MHz, par périodes d'une heure à la recherche d'émissions radio pulsées provenant de pulsars. Et LOFAR produit également des images du ciel en ondes radio. La fréquence de rotation de PSR J0250+5854 est tellement faible (c'est l'inverse de la période) que la pulsation était visible sur les images, alors que ce n'est jamais le cas d'ordinaire.
Les chercheurs ont pu caractérisé PSR J0250+5854, grâce à la mesure de la dérivée de la période de rotation (la variation dans le temps de la période, qui vaut 2,7 10-14 s.s-1). Il savent ainsi qu'il est âgé de 13,7 millions d'années et qu'il possède encore un champ magnétique puissant de 2,6 1013 Gauss, en configuration bipolaire. Mais ils sont étonnés de voir un pulsar aussi lent encore capable d'émettre un faisceau d'ondes radio. L'émission radio aurait dû simplement s'arrêter.
Pour tenter d'en savoir plus sur cet étonnante étoile à neutrons, la collaboration internationale planifie d'ores et déjà de l'observer en rayons X avec XMM-Newton. Une détection de rayons X pourrait fournir de précieuses informations sur l'histoire de ce pulsar et pourquoi il a une vitesse aussi lente. Dans leur article publié par The Astrophysical Journal, Chiamin Tan et ses collègues annoncent pour finir que PSR J0250+5854 pourrait ne pas rester seul très longtemps dans la catégorie des pulsars super-lents, grâce à un algorithme de recherche de signaux qu'ils ont concocté et testé sur son cas avec un énorme succès.
Source
LOFAR discovery of a 23.5-second radio pulsar.
C.M. Tan et al.
The Astrophysical Journal 866 54 (11 october 2018)
Illustrations
1) Vue d'artiste d'un pulsar (NASA Goddard Space Flight Center)
2) Distribution des pulsars connus : dérivée de la période en fonction de la période de rotation, PSR J0250+5854 est la croix rouge la plus à droite (Tan et al.)
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