jeudi 5 décembre 2019

Des systèmes d'étoiles triples détectables par leur accrétion pulsée


On connait bien ce qui se passe lorsqu'une étoile accrète de la matière à partir d'une étoile compagne au sein d'un système binaire. Mais on en sait beaucoup moins dans le cas d'un système triple, où un couple serré d'étoiles accrète la matière de la troisième. Une astrophysicienne américaine montre qu'un tel système produit des effets d'amplification et de pulsation qui peuvent générer des rayons X. De quoi détecter ce type de systèmes triples. Une étude publiée dans les Monthly Notices of the Royal Astronomical Society.



Rosanne Di Stefano (Harvard Smithonian Center for Astrophysics) souhaitait comprendre ce qui se passe lorsque une étoile transfère de la masse à une paire d'étoiles. Elle a pour cela généralisé le processus classique de l'accrétion entre deux étoiles et produit des simulations détaillées des mouvements de matière dans un tel environnement dynamique à trois corps. L'étoile "donneuse" commence à prendre la forme d'une goutte de liquide, remplissant son lobe de Roche, la zone où la matière lui reste encore liée gravitationnellement, puis commence à transférer du gaz via le point de Lagrange L1. Le lobe de Roche et le point de Lagrange L1 fournissent la base mathématique pour calculer exactement ce qui se passe dans un environnement où la gravité et la rotation influencent les mouvements de matière. 
Mais dans un système triple, tout se complique : au lieu d'avoir une position fixe par rapport à deux étoiles comme dans les systèmes binaires, ici, le point L1 effectue une orbite sur une surface tri-dimensionnelle, et le lobe de Roche montre une pulsation périodique.
Il faut se rappeler que les systèmes stellaires triples sont très fréquents, ils sont même dominants parmi la population d'étoiles très massives connue aujourd'hui.

La différence de comportement des paramètres-clé de l'accrétion de matière produit selon Di Stefano un flux de matière depuis l'étoile donneuse qui est périodique, reproduisant la période de rotation du couple compagnon. Et l'astrophysicienne révèle grâce à ses calculs transformés en d'élégantes simulations que la pulsation des transports de gaz ont pour effet d'augmenter fortement le taux de transfert.
La vidéo ci-dessous montre le comportement du gaz accrété par le couple depuis l'étoile donneuse formant un système triple. Le gaz est rapidement accrété en formant des volutes complexes autour du couple compact. Cette simulation a été produite par Sophie Schroeder (Niels Bohr Institute) et Morgan Macleod (Institute for Theory and Computation at CfA).




Le couple serré en rotation joue le rôle d'un aspirateur de l'enveloppe de sa grande compagne. A tel point que si ce couple binaire est constitué de résidus de supernovas (étoiles à neutrons u trous noirs), le fort taux de transfert de gaz peut en faire les sources de rayons X les plus brillantes de la galaxie. 
Rosanne Di Stefano en conclut que les astrophysiciens des rayons X devraient pouvoir facilement identifié des systèmes triples via ce mécanisme d'émission. Elle prédit même que certains objets auparavant classés comme des binaires X pourraient se révéler être en fait des systèmes triples dans lesquels un couple resserré accapare rapidement de la masse à la troisième composante. 


Source

The dynamical Roche lobe in hierarchical triples 
Rosanne Di Stefano
Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, Volume 491, Issue 1, (January 2020)


Illustration

Visualisation du transfert de matière par l'accrétion du couple compact (Sophie Schroeder (Niels Bohr Institute) et Morgan Macleod (Institute for Theory and Computation at CfA).

1 commentaire :

Youx a dit…

Bonjour Eric,
Les deux étoiles compactes ne perdent pas de l'énergie cinétique à tourner dans cette soupe?