De nombreuses paires de galaxies en train de finir de fusionner ont été observée par une équipe d'astronomes. En regardant de très près le coeur des noyaux galactiques, ce sont des paires de trous noirs supermassifs très rapprochés l'un de l'autre que les chercheurs peuvent entrevoir par leurs émissions indirectes...
Michael Koss (Université du Maryland) et ses collaborateurs publient cette semaine leurs travaux dans Nature. Ils ont exploité des observations du télescope de l'Observatoire Keck à Hawaï ainsi que des télescopes spatiaux Hubble et Swift sur plusieurs centaines de galaxies relativement proches, ayant une distance moyenne de 100 Mpc (330 millions d'a.l).
Les astronomes ont d'abord cherché des trous noirs actifs mais obscurcis, grâce aux 10 années d'archives de l'instrument BAT (Burst Alert Telescope) de Swift (en rayons X durs). Ces rayons X assez énergétiques ont le grand intérêt de transpercer les épais nuages de poussière et de gaz qui entourent souvent les noyaux actifs de galaxies. Ils ont ensuite creusé les archives de Hubble correspondant aux galaxies en train de fusionner qu'ils avaient trouvé en rayons X puis ont cherché celles qu'ils n'avaient pas trouvé dans les archives Hubble avec cette fois-ci le télescope Keck, dans le proche infra-rouge.
De nombreuses galaxies de leur échantillon (481 en tout) sont très similaires en taille à notre Galaxie ou à la galaxie d'Andromède. Les chercheurs obtiennent des images avec une très bonne résolution qui montrent très clairement un double noyau dans ces galaxies qui sont en train de finir de fusionner pour ne former plus qu'une seule galaxie. Mais il n'y a pas que des étoiles et du gaz dans ces images, il y a aussi des signes distinctifs de la présence de trous noirs supermassifs. Et ces derniers se trouvent le plus souvent à grande proximité l'un de l'autre. Koss et ses collaborateurs trouvent que 17% des galaxies de leur échantillon possèdent un tel couple de trous noirs supermassifs dans leur centre, en train de spiraler l'un vers l'autre. Ce nombre de couples de trous noirs supermassifs a surpris les chercheurs qui s'attendaient à en trouver moins car la plupart des simulations de fusions de galaxies indiquent que la phase de coalescence des deux trous noirs supermassifs est assez rapide (moins de 50 millions d'années).
Les chercheurs en concluent que les noyaux galactiques très lumineux qui sont trouvés dans des galaxies en interaction sont une signature de la présence d'une paire de trous noirs supermassifs en train de spiraler tout en grossissant au passage.
Ce n'est pas si simple de trouver des noyaux galactiques aussi rapprochés à la toute fin de la phase de fusion galactique. La plupart des observations antérieures de fusions de galaxies concernaient des phases plus précoces de la coalescence des trous noirs galactiques, pour des galaxies situées 10 fois plus loin et plus tôt. Dans la phase plus tardive, où les galaxies matures ont quasi fini de fusionner, celles-ci sont pleines de gaz et de poussières qui ont pour effet d'obscurcir les rayonnements des noyaux activés par les trous noirs.
Les simulations de fusions de galaxies montrent bien comment les deux trous noirs qui entrent en interaction dans la dernière phase grossissent fortement en accaparant du gaz au cours de leur danse macabre. Et c'est ce que constatent les astronomes. En fait, juste avant de fusionner pour former un unique trou noir encore plus massif, les deux trous noirs supermassifs grossissent de plus en plus vite en absorbant toute la matière facilement à leur disposition par les flux de matière induits par la fusion des deux galaxies, et c'est une des façon d'expliquer les taux de grossissement très importants des trous noirs supermassifs. Il ne s'agirait pas que de l'addition des deux masses des trous noirs moins l'énergie gravitationnelle émise en ondes gravitationnelles, mais aussi d'un gain de masse individuelle acquise juste avant la coalescence, qui est elle-même induite par la fusion des deux galaxies.
Malheureusement, les chercheurs estiment que les cœurs de nombreuses galaxies pourtant proches ne peuvent pas être résolus par Hubble. Mais le futur télescope Webb (prévu en 2021, soyons optimistes), devrait en trouver à foison grâce à son excellente sensibilité en infra-rouge et sa meilleure résolution angulaire, et il les trouvera à la fois dans l'Univers jeune où les fusions sont plus fréquentes et dans les galaxies proches, ce qui permettra d'en mesurer certaines caractéristiques physiques.
Source
A population of luminous accreting black holes with hidden mergers
Michael J. Koss, et al.
Nature volume 563, pages 214–216 (07 november 2018)
Illustration
Exemple de 5 galaxies dans leur dernière phase de fusion qui montrent la présence de deux trous noirs supermassifs actifs (NASA, ESA, and M. Koss (Eureka Scientific, Inc.)
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