Cette magnifique observation d'une jeune étoile nommée AS 209 par ALMA montre un disque protoplanétaire arborant une série d'anneaux de poussière très bien découpés, ou plutôt un disque avec plusieurs lacunes. Les chercheurs pensent qu'une seule planète a pu être à l'origine des deux lacunes.
Le système AS 209 est situé à 410 années-lumière. Les astrophysiciens ont utilisé le réseau ALMA pour imager le continuum d'émission de la poussière, à 1,3 mm de longueur d'onde. Les deux anneaux de poussière sont situés à respectivement 75 et 130 unités astronomiques de l'étoile, ce qui donne une distance moyenne pour les deux lacunes de 62 et 103 UA. La lacune la plus interne est donc beaucoup moins large que celle située plus loin, et Davide Fedele (Istituto Nazionale di Astrofisica) et son équipe parviennent à déterminer que cette lacune interne est partiellement composée de grains de poussière de taille millimétrique, alors que la lacune externe est complètement vide.
En analysant cette structure vue quasi de face grâce à des simulations hydrodynamiques 3D de l'interaction d'une planète avec un disque de poussière, les astronomes ont d'abord pensé qu'une planète de 0,67 fois la masse de Saturne orbitant à 95 UA avait créé la grosse lacune externe située à une distance de l'étoile égale à trois la distance Soleil-Neptune. Le passage répété de la planète a pour effet de repousser la poussière de part et d'autre.
La lacune interne, quant à elle, aurait pu être produite par une planète plus petite. Il se trouve en effet que la position relative des intervalles est proche d'un ratio de résonance 2:1. Mais les caractéristiques de cette lacune la plus interne posent des contraintes fortes sur la masse de la seconde planète qui ne devrait pas excéder 10% de la masse de Jupiter.
Mais il existe un autre scénario : il avait été montré dans deux études parues en 2017 (Dong et al., Bae et al.) que si le disque de poussière possède une viscosité extrêmement faible, quasi-nulle, une seule planète peut produire plusieurs lacunes dans le disque. Or il se trouve que pour produire la lacune externe dans leur simulations, les astrophysiciens doivent introduire une viscosité du disque déjà très faible. Ils ont donc simulé le cas avec une seule planète et un disque invisque. Et le résultat est encore meilleur qu'avec deux planètes, produisant une profonde lacune externe et une seconde lacune à la bonne distance approximativement, et avec les bonnes largeurs et profondeurs.
Et chose intéressante, la simulation produit également une lacune supplémentaire située à environ 35 UA. Or le profil d'intensité observé par les chercheurs montre une structure de faible amplitude ressemblant à une lacune à cette même distance de l'étoile...
Davide Fedele et ses collègues arrivent à la conclusion que les deux scénarios (1 planète ou 2 planètes) sont tous les deux valides, même si ils montrent une préférence pour le cas à une seule planète. Dans les deux scénarios, le très jeune âge du disque protoplanétaire de AS 209, qui est estimé entre 0,5 et 1 million d'années seulement, implique tout simplement que les planètes géantes doivent se former dans cette courte durée, inférieure à 1 million d'années.
Sources
ALMA continuum observations of the protoplanetary disk AS 209. Evidence of multiple gaps opened by a single planet
D. Fedele, M. Tazzari, R. Booth, L. Testi, C. J. Clarke, I. Pascucci, A. Kospal, D. Semenov, S. Bruderer, Th. Henning and R. Teague
Astronomy & Astrophysics 610, A24 (20 février 2018)
Bae, J., Zhu, Z., & Hartmann, L. 2017, ApJ, 850
Dong, R., Li, S., Chiang, E., & Li, H. 2017, ApJ, 843
Illustration
AS 209 imagé par ALMA (ALMA (ESO/NAOJ/NRAO)/ D. Fedele et al.)
1 commentaire :
La nature cosmique m'impressionnera toujours... Encore une découverte intéressante !
Enregistrer un commentaire